Conserverie Lou Mujou

La poutargue revisite l’histoire

Avant 2011, le couple Paez ne connaissait rien à la transformation ancestrale des œufs de muge. Depuis, ils en narrent les moindres détails devant un public curieux de connaître les secrets du « caviar du pauvre ».

Frédéric Paez aime les autres. Ça se voit, ça s’entend, ça se devine… Le ton est généreux, le propos chaleureux, la passion communicative. Puis il y a un détail qui ne trompe pas : « Avec mon épouse, nous sommes des amoureux de spécialités culinaires ». Le type même de qualité qui a besoin de se partager pour être exhaussée. « J’avais créé un petit blog sur ce thème il y a quelques années », sourit le responsable de la conserverie Lou Mujou. La poutargue ? Elle est arrivée par hasard dans leur vie. « Mon épouse est historienne, je viens de l’aéronautique. Nous cherchions à changer de vie. Nous avons repris cette affaire en 2011. Cette conserverie a une longue et riche histoire. Nous sommes tombés sous le charme historique de la poutargue et c’est ce qui a motivé notre choix », assure-t-il.

Le goûter des gamins de Martigues

L’ouverture vers l’extérieur relève pour eux de l’évidence. « Nous avons d’abord noué des partenariats avec les offices de tourisme de la région. Puis la Chambre des métiers nous a dirigés vers la Cci pour obtenir la marque Qualité Tourisme. J’anime les visites de la conserverie deux fois par mois. Le label nous permet d’avoir une visibilité nationale. Lorsqu’ils voyagent, les touristes aiment découvrir les savoir-faire locaux. C’est un bon critère sélectif pour les particuliers ou les organisateurs de voyages collectifs quand ils réfléchissent à la manière de composer leur voyage ». La poutargue est ancrée dans l’histoire des pêcheurs de Martigues et de Port-de-Bouc. Pendant les deux heures que dure la visite, Frédéric Paez ausculte ce « patrimoine local ». L’histoire de la poutargue se prête facilement à l’évocation. « Beaucoup de personnes âgées me racontent qu’enfants, elles en mangeaient au goûter avec un morceau de pain. Des marchands ambulants passaient dans les rues pour en vendre. Tous les pêcheurs avaient le don de conserver la poutargue ». Un produit unique, comme l’éclairage d’un art de vivre…

Un goût rare et détonant

Extraction des œufs de muge (poisson qui contient ce trésor de sapidité), salaison, déveinage, etc. Le couple Paez reproduit les mêmes gestes que les anciens pêcheurs, avec cette minutie respectueuse d’un art du terroir que le temps renforce. A l’ère de la mondialisation, la raréfaction du muge a fait de la poutargue un produit de luxe, que l’on nomme le « caviar du pauvre » : le cours des œufs de muge a doublé en l’espace de six ans ! « Pour faire une bonne poutargue, il faut du temps et des œufs de qualité. Certaines poutargues arrivent aujourd’hui de Mauritanie et sont entourées de cire. Or, la vraie poutargue n’a pas cette apparence, elle se vend en brut », précise Frédéric Paez. Allié puissant de nos salades et de nos plats de pâtes, la poutargue provoquera en bouche ce goût rare et détonant qui ravit les orpailleurs de singularité. Et qui les poussent à visiter cette conserverie de Port-de-Bouc comme on le ferait d’un temple dédié aux infimes plaisirs de l’existence.

Dominique Albini

Conserverie Lou Mujou – La saveur des calanques. Anse Aubran, quai des sardiniers 13110 Port de Bouc 04 42 06 10 77 contact@poutargue.fr

http://www.poutargue.fr

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